mercredi 7 septembre 2011

Immaturité comme origine du mal: étude clinique du cas de Bachar el-Assad


Dans ma réponse1 à l'Initiative nationale pour le changement2, qui était basée sur la prémisse que Bachar allait démissionner peu après le début des manifestations,  je leur ai expliqué que cela n'arriverait pas et le combat avec le régime allait prendre plusieurs années. J'ai basé mon jugement sur mon évaluation personnelle de la situation en Syrie et aussi sur ma connaissance personnelle de la personnalité de Bachar. Cette personnalité qui est caractérisée principalement par son immaturité et conséquemment son manque de conscience. La question que beaucoup peuvent se poser est comment immaturité personnelle peut conduire une personne à perdre son âme et conscience. Ainsi, afin de rester au pouvoir, il commit des crimes affreux, détruisant lui-même et beaucoup de gens autour de lui.

Une caractéristique importante des personnes matures, c'est qu'ils peuvent comprendre et faire face à des réalités sociales complexes. Ces complexités résultent principalement de la profondeur de la psyché humaine et la complexité des relations sociales. Ainsi, des personnes mûres peuvent comprendre leurs propres besoins qui leur sont nécessaires pour grandir psychologiquement et s'épanouir. De plus, ils peuvent comprendre les besoins réels des autres, qui sont importants pour que ces personnes réalisent leurs propres potentiels. Ainsi, les personnes matures peuvent satisfaire leurs propres besoins et les besoins des autres d’une manière harmonieuse. Enfin, les personnes matures ont une bonne connaissance des lois qui régissent les relations et interactions humaines, ainsi ils conduisent les événements de vie à la meilleure issue pour eux et pour les gens autour d'eux. Par conséquent, ils apprennent à être décisif et qu'ils acquièrent le sentiment de pouvoir. En effet, en tant qu'êtres humains, nous développons ces capacités dans le laboratoire de la vie à travers nos expériences personnelles à partir de premiers jours de nos vies. Si pour quelque raison que nous ne vivons pas une vie active caractérisée par de riches expériences à travers les quelles nous pouvons apprendre, nous ne pouvons pas acquérir ces capacités. D’ailleurs, toutes ces capacités déterminent l’état de notre conscience et nous fait donc en mesure de juger ce qui est bon et ce qui est mauvais. En d'autres termes,  nous s’établirons des principes sûrs pour distinguer le bien du mal. Par conséquent, les gens matures sont caractérisés par une conscience développée, tandis que les gens immatures n'ont pas cette faculté précieuse.

J’ai connu Bachar pendant mes études de médecine. Bachar à cette époque avait l'air d’être gentil et modeste. D’ailleurs, il avait l'air heureux, ou plutôt il avait l'habitude de plaisanter tout le temps. Ce caractère permettait de fournir aux gens autour de lui un sentiment de confort. Cela était parce qu'ils sentaient que malgré ils sont en présence du fils du président, ils n'ont pas besoin d'être formels. Cependant, quand maintenant je réfléchis au comportement de Bachar pendant l’étude de médecine, je peux voir les premiers signes de son immaturité. En effet, ses relations avec les gens autour de lui étaient superficielles. Il était entouré par beaucoup gens, mais aucun n’était un ami réel. Cependant, il avait besoin de profondes et vraies relations pour qu’il puisse mûrir et grandir psychologiquement. Il avait besoin de relations réelles afin s’en connaitre and connaitre les êtres humains autour de lui. En outre, ses plaisanteries étaient une sorte de rigolade superficielle plutôt que des plaisanteries qui viennent de situations de la vie réelle ou reflètent un bon état d’esprit et d’intelligence. En effet, Bachar a été déconnecté de la réalité de soi-même et de gens autour de lui et de sa personnalité agréable et amusant n’a été qu’une escapade du monde réel.

J'ai formulé mon interprétation de la personnalité de Bachar mentionnés ci-dessus à partir les idées que j’ai acquises en étudiant le parcours de sa présidence et en reliant ces idées à des souvenirs anciens que j’ai retenus sur Bachar mentionnés ci-dessus. Puisque j’ai assez parlé sure mes anciens souvenirs penchons-nous sur le parcours de sa présidence. Bachar a commencé son mandat avec son célèbre discours d'investiture. Dans ce discours, Bachar a promis beaucoup de réformes. Cependant, dix ans plus tard il est venu dire qu'il n'a pas été en mesure d'atteindre aucun de ces réformes en raison des circonstances difficiles. En effet, Bachar n'était pas capable de réaliser ces réformes, car il a un handicap inhérent à sa personnalité. Ce handicap est précisément son indécision et son sentiment omniprésent d'impuissance. Un autre événement précoce dans la présidence de Bashar était le printemps de Damas. Lorsque Bachar a autorisé les forums de discussion, il sous-estimait l’amplitude du désir des Syrien pour la liberté d'expression et d'échanges intellectuels. Il ne comprenait pas l'effet de plusieurs décennies de répression de la liberté d'expression. Il ne comprenait pas que lui et les gens autour de lui manquait la perspicacité intellectuelle qui leur permet de suivre les idées qui pourraient découler de ces forums. Il se pensait qu'il était come un adulte fournissant des bonbons a des enfants, et les enfants devraient être heureux et reconnaissants par ces bonbons. Ainsi, lorsque ces forums ont propagé comme des champignons et les « chiens d'attaque » du régime n'ont pas été en mesure de suivre les idées issues de ces forums, Bachar a ordonné la brusque fermeture ces forums, même mettant certains participants en prison. Cela n'a pas seulement créé des déceptions parmi les intellectuels syriens, mais aussi la douleur et l'amertume. Une autre grosse erreur que Bachar a commise était de mélanger les affaires de l'État avec les affaires familiales. L’archétype de ce mélange était le monopole sur le business de téléphone mobile que Bachar a offert à son cousin (Rami Makhlouf), provoquant ainsi les hommes d'affaires Damascènes et rompant le convenu implicite que Hafez al-Assad a fait avec eux. Tout cela a conduit à mettre Riad Saif et Maamoun al-Homsi en prison sur de fausses accusations, provoquant ainsi la douleur et l'amertume de la classe traditionnelle d’hommes d’affaires Damascènes. Tous les exemples mentionnés ci-dessus reflètent l'incapacité de Bachar à comprendre et manager des réalités sociales complexes. Cependant, j'ai trouvé que l'exemple le plus choquant de ses émotions négatives et de déconnexion avec la réalité a été son premier discours pendant la révolution Syrienne, au cours de lequel il souriait tout le temps tandis que des gens mouraient dans la rue. Ce sourire était une indication que Bachar a perdu toute forme de conscience. De plus, ce sourire m’a fait penser à son sourire naïf et immature quand il était jeune et comment il s'est transformé en un sourire idiot et méchant quand il est devenu plus âgés. Cela m’a suggéré l’idée que l'immaturité engendre le mal.

En effet, tous les exemples mentionnés ci-dessus reflètent la façon dont les situations complexes, comme la présidence, pourrait voler en éclats les fondements psychologiques des gens immatures  et naïfs, les transformant en personnes sans conscience et chefs impitoyables, commettant des crimes atroces. De plus, elle nous fait douter de la sagesse du père, Hafez el-Assad, qui peut être en souhaitant être éternel et malgré les conseils que lui ont été offerts à ne pas le faire, a légué son trône à son fils inaptes, Bachar, jetant ainsi une malédiction sur lui.


Réponse à l'Initiative Nationale pour le Changement


Chers signataires de l'Initiative nationale pour le changement en Syrie1:

Toronto, le 30 avril 2011

Platon a dit: "Une des pénalités dans le fait de refuser de participer à la politique, est qu'on fini d'être gouverné par des inférieurs". Pour cette raison, je fais toujours de mon mieux pour exercer mes droits et mes responsabilités politiques. Par conséquent, comme un bon citoyen syrien, j'ai lu avec attention votre initiative et formulé ma contribution à ce sujet, que je vais exposer dans ce message.

D'abord, votre initiative est venue à un moment très critique de l'histoire de la Syrie. Les développements sur le terrain, le mécontentement des gens et les manifestations s'accroissent très rapidement. Pendant ce temps, il ya un manque grave dans le processus politique qui peut mener ce soulèvement pour produire ses résultats favorables. Ce manque de processus politique est à la fois de la part du gouvernement et de l'opposition. Le gouvernement a tenté de faire quelques «réformes», mais ces «réformes» est venu « trop peu, trop tard ». De plus, ces réformes semblaient timides, peu convaincante et hypocrite. Cela signifie que le gouvernement va sans doute s'effondrer un jour ou l'autre sous la pression du peuple. Voici la question importante : Où sont les initiatives politiques de l'opposition?! Sans une alternative politique, le pays va entrer dans le chaos, des agitations énormes et peut être une guerre civile. Ainsi, votre initiative est venue pour remplir dans une certaine mesure le manque de processus politique sérieux en Syrie. Cependant, j'ai quelques commentaires sur cette initiative.

Tout d'abord, dans votre proposition vous comptez sur le président pour comprendre la réalité et de se démissionner maintenant pour le bien du pays. Malheureusement,  je pense que cela n'arrivera pas. Je connais Bachar personnellement. Je sais bien de quel type de personnalité il est. Bachar a été une "bonne" personne, toutefois superficielle. En effet, Bachar n'a pas une bonne compréhension de la vie réelle. Par conséquent, Bachar aurait pu avoir des bonnes intentions, quand il a commencé sa présidence. Cependant, il n'a pas la capacité de les réaliser. Cet échec est inhérent à son caractère qui manque de charisme et d'intelligence sociale. Ainsi, il n'a pas été en contrôle et qu'il ne sera pas ; il n'a pas eu le courage, et il n'aura pas prochainement. En bref, il est immature et n'a pas de capacités personnelles qui lui permettent d'avoir une croissance psychologique appropriée. Comme vous le savez, les gens quand ils ne peuvent pas progresser psychologiquement, ils régressent (s'il vous plaît se référer à Karen Horney dans «nos conflits intérieurs»). En d'autres termes, ils s'aggravent et devienne  plus dysfonctionnel et par conséquent plus mal. Ceci s'applique particulièrement aux gens immatures au pouvoir, parce que pendant leurs règnes, ils deviennent extrêmement possessifs, arrogants, narcissiques, impitoyables et paranoïaques (s'il vous plaît se référer à Eric Fromm dans « La passion de détruire : Anatomie de la destructivité humaine»). Bachar ne fait pas exception. A ce jour, il certainement croit qu'il est né pour être président. Même, il est le meilleur d'eux tous. Il est le sauveur de la Syrie et probablement du monde arabe entier (comme son père avait l'habitude de croire). Ne pensez pas que pour eux ce sont des mots vides avec lequel ils essayent simplement de nous bluffer. Pas du tout, ils y croient profondément dans leurs esprits. Ces fausses croyances sont appelées en psychologie des auto-illusions (s'il vous plaît se référer à Cordelia Fine dans "Un cerveaux de son propre chef"). Cependant, Bachar sait que sans la présidence, il n'est rien. Personne ne va le respecter. Personne ne va le glorifier. Personne ne va l'adorer. Par conséquent, ne comptez pas sur lui de quitter la présidence simplement pour le bien du pays. Il ne laissera pas facilement la présidence. Il n'abandonnera pas avant d'atteindre le point d’effondrement psychologique total (je peux en dire davantage sur ce point, si vous le souhaitez). D'autre part, il va quitter à la fin, lorsque les manifestations s‘accroîtront et le pays au bord de la destruction totale. En bref, il va finalement quitter la présidence non pas parce qu'il aime le pays, mais à cause de son effondrement psychologique.

Avant que le président démissionne officiellement, encourager n’importe quel haut officier militaire, même si c'est le ministre de la Défense ou le chef d'état-major, d’essayer de prendre le pouvoir politique me semble irresponsable, car telle tentative conduira à un schisme dans l'armée et se traduira par une guerre civile semblable à celle de Libye. Comme vous le savez, dans l'armée il y a de nombreuses unités qui sont fidèles à Maher al-Assad, qui lui obéiront jusqu'au bout. Maher ne renoncera pas facilement sa position, même si Bachar quittera la présidence. Tant que Bachar est toujours officiellement au pouvoir, les unités de Maher seront légitimes. Maher va combattre jusqu'au bout pour maintenir le régime. Cependant, quand Basher démissionne ces unités seront illégitimes, si elles n'obéissent pas à la personne qui sera ensuite le commandant en chef. En bref, si un haut officier militaire essaye de prendre le pouvoir politique dans l'état actuel, nous verrons une situation similaire à celle survenue en 1984 lorsque Rifa'at el-Assad a mis ses chars militaires dans les rues de Barzza (á Damas) face aux chars de combat du reste de l'armée syrienne. Par ailleurs, je ne préfère pas, personnellement, toute participation de l'armée dans le processus politique. Je crois fermement que Bachar va démissionner quant les manifestations augmentent, conduisant à son effondrement psychologique.

Pour toutes les raisons ci-dessus, je pense que votre proposition n'est pas une solution viable à la crise actuelle, même si elle a stimulé nos cerveaux et nous a fait réfléchir sur la dimension politique de la crise. Ai-je une proposition alternative?! La réponse est simplement "non". Mais, j'ai quelques idées pour échanger avec vous:

1. Nous (je parle de ma position comme un citoyen syrien ordinaire) ont besoin de plus d'idées et de propositions auprès de vous et de les autres groupes d'opposition. J'espère que ces groupes vont échanger leurs idées avec le reste des groupes d'opposition et le peuple syrien (au moins à travers les médias qui atteignent plupart des Syrien) jusqu'à il y a un certain consensus parmi un pourcentage raisonnable des groupes d'opposition sur un plan commun d'action.

2. Les groupes d'opposition devraient commencer à exposer non seulement leur point de vue concernant la manière de résoudre la crise actuelle, mais aussi leurs visions pour l'avenir du pays. Ceci devrait inclure les échecs du passé (bien sûr, sans accusations ou blâme) pour l’éviter à l'avenir. Cet échange d'idées, si civilisée, va accélérer la chute du régime, fortifier l'opposition, encourager le peuple syrien á joindre la révolution et faire la période de transition plus facile.

3. Si la situation continue pour quelque mois comme il est maintenant avec de gens tués tous les jours, les groupes d'opposition doivent se rencontrer et d'essayer de formuler une vision commune pour la crise. Ils devraient le faire avec des réunions informelles d'abord et enfin dans une conférence officielle. Une opposition unifiée brisera le régime et accélérera sa chute. Je sais dans quelle mesure ces réunions seraient difficiles. En fait, ma connaissance sur les groupes d'opposition en Syrie est très limitée.

4. A la fin, si les gens continuent leurs manifestations et le gouvernement poursuivra sa répression sans aucune solution politique à l'horizon, l'opposition doit former un gouvernement en exil, qui gagnerait la reconnaissance de tous les gouvernements occidentaux. A ce moment, le régime perdra toute légitimité et tombera plus rapidement que nous le pensons. De plus, cela rendrait la transition plus facile et les gens plus confiants dans leur lutte.

J'envoie ces idées à vous comme un citoyen syrien ordinaire qui fait toute attention à accomplir ses devoirs et de prendre l'opportunité de bénéficier ses droits. Je ne travaille pas et n’ai pas l’intention de travailler en politique. Je suis médecin et chercheur, en effet, c'est le seul travail à travers lequel je me sens que je peux réaliser mon potentiel humain.

Cordialement

Haytham Khoury

(1) P.S. Ce message a été envoyé à Radwan Ziadeh, Najib Ghadbian  et Aussama Munajed, le 30 avril 2011 en réponse à leur Initiative nationale pour le changement en Syrie publiée le 29 avril 2011.